mercredi 28 octobre 2009

Françafrique : Avalanche de condamnations au procès Angolagate

Falcone, Gaydamak, Pasqua et Marchiani condamnés à de la prison ferme par le tribunal correctionnel de Paris


Le jugement en correctionnelle de l’affaire de l’Angolagate a surpris, ce mardi, à Paris. Les peines ont été lourdes pour les associés Pierre-Joseph Falcone et Arcadi Gaydamak, qui sont condamnés à 6 ans de prison. Charles Pasqua et Jean-Charles Marchiani ont également été condamnés à de la prison ferme. Jean-Christophe Mitterrand et Paul-Loup Sulitzer ne sont condamnés qu’avec sursis, tandis que Jacques Attali et Georges Fenech ont finalement été blanchis.


Le tribunal correctionnel de Paris a rendu ce mardi son jugement dans l’affaire de trafic d’armes dite de l’Angolagate. Des 42 prévenus, seuls 6 ont été relaxés. Le tribunal a dépassé à plusieurs reprises les réquisitions du parquet, et a de la sorte surpris certains commentateurs par sa sévérité.


Les condamnés Pierre-Joseph Falcone, Arcadi Gaydamak et Charles Pasqua ont d’ores et déjà annoncé qu’ils allaient faire appel du jugement. Pasqua a par ailleurs demandé le soir même la levée du secret défense, accusant Jacques Chirac d’avoir tout su sur le trafic d’armes, alors qu’il était Premier ministre.


Six ans pour Falcone et Gaydamak


L’homme d’affaires Pierre-Joseph Falcone est condamné à 6 ans de prison ferme, assortis d’un mandat de dépôt. Il a donc quitté le tribunal entre deux gendarmes pour être immédiatement emmené en détention. Il est reconnu coupable de « commerce illicite d’armes », « fraude fiscale » et de « trafic d’influence ». Falcon est depuis 2003 représentant de l’Angola à l’Unesco, mais son immunité diplomatique n’a pas joué, étant donné l’antériorité des faits et la nationalité française du prévenu.


Il est avec son associé, le milliardaire russo-israélien Arcadi Gaydamak, le principal accusé du procès. Lui aussi condamné à 6 ans de prison, pour « commerce illicite d’armes », « abus de biens sociaux », « fraude fiscale », « trafic d’influence actif » et « blanchiment », il ne purgera pas sa peine pour l’instant. Il est en effet réfugié en Israël puis en Russie, pour échapper à plusieurs mandats d’arrêt internationaux. Gaydamak possède le club de foot du Beitar de Jérusalem.


Falcone et Gaydamak ont vendu dans les années 1990 des armes au régime angolais de José Eduardo dos Santos, aux prises avec les rebelles de l’Unita. 790 millions de dollars (530 millions d’euros) de contrats ont été signés malgré un refus officiel de la France, pour des chars, des hélicoptères, des navires de guerre, des obus et des mines antipersonnelles. Le bénéfice réalisé était de l’ordre de
400 millions de dollars (270 millions d’euros). De quoi permettre aux deux associés de faire preuve de générosité avec les personnes impliquées, pour couvrir le trafic.


Prison ferme pour Pasqua et Marchiani


Le sénateur UMP Charles Pasqua, ancien ministre de l’Intérieur, a été condamné à 1 an de prison ferme et 2 ans avec sursis pour « trafic d’influence » et « recel d’abus de biens sociaux ». Il doit également payer une amende de 100 000 euros. Le procureur n’avait requis que 3 ans avec sursis. Le tribunal l’accuse d’avoir effectué, contre rémunération, du lobbying en faveur des intérêts angolais.


L’ancien préfet Jean-Charles Marchiani, proche de Charles Pasqua, a été condamné à 3 ans de prison, dont 21 mois avec sursis, pour « complicité de trafic d’influence » et « recel d’abus de biens sociaux ». Il avait été partiellement gracié en février par le Président Nicolas Sarkozy.


Sursis pour Mitterrand et Sulitzer


Le fils de l’ancien président François Mitterrand, Jean-Christophe Mitterrand, a été relaxé de l’accusation de « complicité de commerce illicite d’armes », mais condamné à 2 ans de prison avec sursis et 375 000 euros d’amende pour « recel d’abus de biens sociaux ». Ancien de la cellule africaine de l’Elysée, il est décrit comme l’intermédiaire de Falcone avec le régime angolais de dos Santos. Il aurait touché 2,6 millions de dollars (1,8 millions d’euros) de commissions.


Le romancier et homme d’affaires Paul-Loup Sulitzer, est condamné à 15 mois de prison avec sursis et 100 000 euros d’amende pour « recel d’abus de biens sociaux ». On lui reproche d’avoir usé de son influence pour redorer l’image médiatique de Falcone et Gaydamak.


Attali et Fenech acquittés


L’essayiste Jacques Attali, ancien conseiller de l’Elysée, a été relaxé au bénéfice du doute des accusations de « trafic d’influence passif » et « recel d’abus de biens sociaux ». Il était accusé d’une intervention en faveur de Gaydamak et Falcone, touchés par un redressement fiscal. Les sommes qu’il a perçues ont bien rémunéré un travail sur le micro-crédit, a jugé le tribunal.


L’ancien magistrat Georges Fenech a également été relaxé. Le parquet requérait contre lui 6 mois de prison avec sursis pour « recel d’abus de biens sociaux », du temps où il était président de l’Association professionnelle des magistrats (APM), classée à droite.


L’Unita, désormais dans l’opposition légale en Angola, a salué le jugement, y voyant une preuve de la corruption du pouvoir de dos Santos. En visite sur place, en mai 2008, Nicolas Sarkozy avait insisté sur le caractère purement français du procès, dans un contexte de réconciliation franco-angolaise.


Mardi 27 octobre 2009, par Denis Carlier de  Afrik.com

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